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Calls for Papers and Contributions

Appel à communications : Des Collections de Mémoires à Saint-Simon : réception des Mémoires au xixe siècle
Posted: Tuesday, October 1, 2019 - 00:46

Journée d’études organisée au Château de Versailles par la Société Saint-Simon

Samedi 14 mars 2020

par François Raviez (Université d’Artois) et Damien Crelier (Sorbonne Université)

 

Les vingt volumes de la première édition complète des Mémoires de Saint-Simon paraissent en 1829-1830. Dans les dix années qui ont précédé, la Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, publiée par Petitot et Monmerqué, a réuni en cent-trente volumes les textes les plus divers, de Philippe-Auguste au xviiie siècle. Plus qu’un phénomène d’édition, il s’agit là d’un trait de civilisation : la Restauration se penche sur le passé du royaume et demande à ses témoins de lui raconter la France. Les trente-deux volumes de la Nouvelle collection de mémoires (1836-1839) de Michaud et Poujoulat confirmeront sous la monarchie de Juillet cet intérêt, ou plutôt cette passion, qu’illustrera, dans la fiction, le succès des romans d’Alexandre Dumas. La découverte de Saint-Simon par le xixe siècle s’inscrit ainsi dans un mouvement d’ensemble qui associe curiosité et érudition, enracinement et nostalgie, le savoir et la saveur d’un Ancien Régime encore très proche.

Les Mémoires de Saint-Simon n’apparaissent donc pas de façon inattendue, d’autant que des textes ont déjà circulé, des extraits ont déjà été publiés qui ont pu mettre en appétit un lectorat affamé d’histoire de France et qui, sous le règne de Charles X, va pouvoir découvrir celui de Louis XIV. Lorsque le général de Saint-Simon, descendant indirect du duc et pair, récupère aux Affaires étrangères le manuscrit des Mémoires et annonce sa publication, il le fait assurément par fidélité familiale, mais aussi parce que l’époque est propice au succès de ce genre de texte. Comment l’expliquer ? Comment l’interpréter ? L’objectif de cette journée d’étude est de mesurer, dans la presse, dans la littérature, mais aussi auprès des historiens, l’influence des mémoires d’Ancien Régime sur un siècle qui, tout en se tournant vers le passé, invente la modernité.

L’introduction de Sainte-Beuve à l’édition Chéruel des Mémoires de Saint-Simon (1856-1858) est, à ce titre, éclairante : « au sortir de sa lecture, écrit le critique, lorsqu’on ouvre un livre d’histoire ou même de Mémoires, on court le risque de trouver tout maigre et pâle, et pauvre : toute époque qui n’a pas eu son Saint-Simon paraît d’abord comme déserte et muette, et décolorée ; elle a je ne sais quoi d’inhabité ». L’histoire qui se devine et se dessine ici n’est pas seulement celle des faits, mais celle des hommes : les noms prennent chair, l’événement s’y déploie en spectacle. Tous les Mémoires publiés dans la première moitié du xixe siècle ne peuvent rivaliser en intensité avec ceux du duc et pair, mais de volume en volume, c’est une mémoire nationale qui se révèle, un témoignage multiple, inégal, inattendu dont Saint-Simon serait le fleuron. Comment, dans cette perspective, ne pas songer à Michelet, à son don de placer le lecteur de plain-pied avec le passé, Michelet qui habite l’histoire et nous en ouvre la porte, comme Saint-Simon, hanté par la cour, nous y introduit la plume à la main ? Cette histoire vivante et vibrante, à l’âge du romantisme, conditionne encore pour une part notre lecture de Saint-Simon.

On pourra dès lors s’interroger, au cours de cette journée, sur la signification et la portée de la publication des mémoires d’Ancien Régime, en particulier ceux de Saint-Simon, dans les premières décennies du xixe siècle : portée littéraire, tout d’abord, tant la langue libre et spectaculaire de ce dernier avait tout pour séduire les romantiques ; portée historiographique, qui inaugure un rapport au passé qui ne soit pas que factuel, mais prenne en compte les hommes et leurs passions ; portée politique enfin, comme si après la parenthèse révolutionnaire, voire impériale, un monde ancien reprenait forme et sens.

Les propositions de communications doivent être envoyées aux deux adresses suivantes : francois.raviez@univ-artois.fr et damien.crelier@gmail.com au plus tard le 15 octobre 2019, sous la forme de présentations de 3000 signes environ.

Appel à communications : Bérénice, trois cent cinquante ans après
Posted: Monday, September 30, 2019 - 19:38

19-20 novembre 2020

Université de Rouen (Maison de l'université, campus de Mont-Saint-Aignan)

Centre d’Études et de Recherche Éditer/Interpréter (EA 3229)

Comité d’organisation :

Caroline Labrune (université de Rouen-Normandie),

Servane L’Hopital (Lycée Malherbe de Caen),

Victoire Malenfer (université de Rouen-Normandie),

Tony Gheeraert (université de Rouen-Normandie)

 

En novembre 2020, Bérénice aura 350 ans. C’est en novembre 1670 en effet que Racine transforma la scandaleuse reine juive dont les historiens anciens nous avaient laissé le portrait, en une amante sublime et résignée, héroïne du renoncement, digne par son sacrifice de rejoindre la galerie des grandes amoureuses de la littérature. La mise en scène du théâtre des Crescite, à la Maison de l’université à l’automne 2018, atteste de ce succès persistant de Bérénice, l’une des pièces les plus aimées et les plus jouées du répertoire racinien. Alain Viala la tient pour l’expression la plus chimiquement pure d’un tragique fondé sur la simplicité et l’intensité passionnelle  : selon lui, Bérénice représente pour Racine “sa formule de la tragédie… une formule ‘hyperracinienne’… l’invention de la racinianité”. Mais, au cours de son histoire, la pièce fut bien plutôt considérée comme une exception, voire une erreur dans le parcours du dramaturge: dès l’époque de sa création, et plus encore au temps des Lumières et pendant l’époque romantique, Bérénice fit l’objet de vifs reproches, au motif que sa tonalité élégiaque et galante nuisait à son efficacité dramatique. “Voilà, sans contredit, la plus faible des tragédies… Ce n’est même pas une tragédie”, estimait Voltaire. Il fallut attendre les interprétations de Sarah Bernhardt et de Julia Bartet, à la fin du XIXe siècle, pour que la pièce retrouve régulièrement les honneurs de la scène et le chemin du succès. Au siècle dernier, Bérénice fit l’objet d’interprétations audacieuses et controversées qui reflétaient les préoccupations de leur temps – la politique chez Gaston Baty en 1946, l’incommunicabilité chez Planchon 1965, ou  encore, chez Jacques Lassalle en 1990, l’intérêt polémique pour un “autre Racine” que celui légué par la tradition scolaire.

Ce sont ces visages successifs et contradictoires de Bérénice et de son personnage éponyme que nous nous proposons d’interroger les 19 et 20 novembre 2020, en explorant d’une part l’évolution du discours critique et des différentes mises en scène qui ont jalonné l’histoire de cette tragédie, et d’autre part en dégageant les grandes tendances des interprétations actuelles.

Les propositions de communication (limitées à 300 mots et accompagnées d’un bref C.V.), sont à envoyer avant le 15 février 2020 à tony.gheeraert@univ-rouen.fr

Appel à communications : Journée d’étude "Plurivocalité et polyphonies : une voie vers la modernité ?"
Posted: Monday, September 30, 2019 - 19:33

Université de Saint Etienne, 9 juin 2020

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Description :

Calquée sur le grec « poluphônia » (multiplicité de voix ou de sons), la notion de polyphonie s’applique en premier lieu au champ de la musique vocale avant de devenir au XXème siècle, par métaphore, un outil d’analyse littéraire (BAKHTINE, Mikhaïl, La poétique de Dostoïevski, Paris, Seuil, 1998 [1929]). En ce sens, elle est d’abord la réalisation romanesque du concept épistémologique bakhtinien de dialogisme, mais, dans l’analyse du discours, elle désigne plus généralement les moyens d’expression propres à produire des formes et des genres littéraires variés (CNRTL). Le terme, souvent compris également comme simple « pluralité des voix narratives », se rapproche ainsi de la notion de plurivocalité, désignant un champ plus étroit de la polyphonie textuelle, qui ne s’assimile pas pour autant à l’acception proposée par M. Bakhtine.

            Il convient donc de parler de polyphonies au pluriel, et de spécifier en littérature si l’on a affaire à la fragmentation de l’instance énonciatrice romanesque en plusieurs relais narratifs, ou à la pluralité des voix au sens large (au théâtre par exemple), ou encore à des fragments de discours hétérogènes (lettres, récits enchâssés, allusions intertextuelles…). Les applications phonologiques du concept sont même à envisager, dans la mesure où elles permettent de mettre en avant le rôle primordial de la polyphonie en poésie, lieu s’il en est de la conjonction de la voix qui fait entendre le son et de la voix poématique qui produit l’énoncé. On pourra aussi réfléchir aux pratiques linguistiques impliquant le passage d’une langue à l’autre, notamment entre langues régionales et langues perçues comme dominantes. Le champ musicologique est aussi à considérer, tant il est vrai qu’une réflexion sur les polyphonies, comme mise en simultanéité d’entités sémantiques diverses, offre des perspectives particulièrement variées. D’autres domaines des arts interviendront éventuellement dans cette réflexion, tant qu’ils s’articuleront autour du passage à la modernité et de sa définition.

Les moyens spécifiques mis en jeu pour représenter différents types de polyphonies entre le XVIème et le XVIIIème siècle pourront ainsi être étudiés, dans le but de mieux comprendre le rapport entre ce concept et la modernité, avant sa réutilisation contemporaine. La plurivocalité et les polyphonies définissent-elles la modernité comme ce qui est récent (cf. « modo »), en rupture avec ce qui la précède ? Sont-elles la marque du changement alors à l’œuvre dans la conception des choses, « du monde clos à l’Univers infini » (KOYRE, Alexandre, Du monde clos à l’Univers infini, Paris, Gallimard, 1988 [1962]) ? Dans quelle mesure reflètent-elles la prise en compte de ces voix multiples ? Impliquent-elles un échange, un dialogue entre ces voix ? Les condamnent-elles au contraire à un affrontement qui serait le propre d’une époque moderne s’opposant à une harmonie passée ? Autant de questions qui donneront lieu à des pistes contribuant à dessiner une certaine définition de la modernité.

En ouvrant le champ géographique à toutes les aires à envisager, il sera possible de penser aussi bien aux voix de Rosaura et Segismundo dans La Vida es Sueño qu’à celle des valets dans de nombreuses autres œuvres dramatiques. On pourra également considérer les discours doubles des personnages du Jeu de l’Amour et du Hasard, le dialogue des voix du narrateur, du traducteur, de Cide Hamete Benengeli et de Miguel de Cervantes dans Don Quichotte… pour ne donner que quelques pistes dans la littérature européenne. Dans le domaine des langues, le plurilinguisme sera par exemple à considérer dans la perspective de la revendication de la modernité par ceux qui recommandent le recours au bilinguisme ou, au contraire, son abandon. S’intéresser par ailleurs, en musicologie, aux chansons à plusieurs textes, aux chansons traduites, aux chants sacrés en latins devenus profanes en langues vulgaires (et vice-versa)... seront des pistes possibles. La polyphonie sera aussi à définir comme pierre angulaire de la naissance des premiers romans modernes, antérieure à l’étape plus contemporaine de la polyphonie bakhtinienne, et à interroger en poésie, par exemple dans le cadre d’une certaine pérennité moderne du sonnet.

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Les propositions de communication, de 1000 caractères maximum soit 10 à 12 lignes, et accompagnées d’une brève bio-bibliographie, devront être adressées à Rafaèle Audoubert (rafaele.audoubert@univ-st-etienne.fr /et/ rafaeleaudoubert@yahoo.fr) avant le 20 janvier 2020. Les réponses aux propositions seront apportées après examen de celles-ci pour le 24 février 2020.

Appel à communications : L’infanticide de l’Antiquité au milieu du XIXe siècle (Europe, Amériques coloniales et postcoloniales)
Posted: Monday, September 30, 2019 - 19:28

Langues acceptées : français et anglais (une bonne compréhension du français est indispensable pour suivre le colloque et participer aux discussions).

Champ chronologique : de l’Antiquité au XIXe siècle

Date : mercredi 27 et jeudi 28 Mai 2020 

Lieu : Université d’Artois, Arras, 9 rue du Temple

Appel à communication : Date limite pour les propositions le 20 octobre 2019. Propositions en français ou anglais de 500 mots maximum, avec brève présentation biographique en format word aux adresses suivantes : Elena Taddia et Pascal Hepner : elenataddia@hotmail.fr ; pascal.hepner@univ-artois.fr

Publication : Les actes du colloque feront l’objet d’une publication.

Contenu scientifique :

L’infanticide est le meurtre du nouveau-né ou du nourrisson perpétré dans la plupart des cas, mais pas seulement, par la mère. Il s’agira de faire le point sur un sujet peu étudié, dans une perspective historique (et non pas clinique ou pathologique) Les axes à envisager, sans pour autant être exhaustifs, sont :

Sources, archives et champs d’investigation : anthropologie, archéologie, criminologie, démographie, épigraphie, histoire, histoire de l’art, histoire du crime, histoire du droit, histoire de la médecine, iconographie, sémiotique, littérature, philosophie, sources juridiques, sources littéraires, la nouvelle frontière de la biologie dans les sciences humaines.

Les mythes, la littérature, le massacre des Innocents, le fantasme et l’infanticide.

L’ambiguïté des gestes : l’abandon ou l’exposition comme forme d’infanticide ? Le registre de la mort de l’enfant est le point envisagé. Par conséquent l’abandon qui n’est pas suivi du décès est exclu du champ de réflexion.

La notion : le mot infanticide/infanticidium varie depuis son apparition chez Tertullien dans l’Apologétique (v.197), et réapparait sous diverses appellations au fil du temps et dans des langues différentes – homicide, avortement, parricide, étouffement etc.

Verbaliser l’infanticide : prêcheurs, juristes, philosophes, pédagogues, accusés, accusateurs, témoins, dénonciateurs.

Sociologie des acteurs de ce crime : mère, père, famille, couple, femmes, servantes, vagabondes, prostituées, ouvrières, ecclésiastiques, religieuses, hommes, acteurs de la justice, médecins et chirurgiens, sages-femmes, nourrices, sorciers et sorcières…

Circonstances : On tue à la sortie de la matrice (étranglé, poignardé, jeté dans les cloaques ou latrines, enterré ou noyé, suffoqué…), sex ratio éventuel d’une élimination théorisée qui se met en place et qui, selon le cas, est appliquée.

Chronologie : De l’Antiquité à la rupture positiviste de la modernité (milieu du XIXe siècle)

Le champ spatial considéré est celui de l’Europe et des Amériques coloniales et postcoloniales y compris le regard porté par ces civilisations vers « l’autre », sans pour autant que ce champ soit limitatif (missionnaires, voyageurs, etc.)

Accuser l’autre d’infanticide : antisémitisme, guerres de religion, puritanisme, affaire des Poisons, chasse aux sorcières…

Rôle de la religion (paganisme, catholicisme et protestantisme) …

Les lieux, dans toute leur variété, où sont retrouvés les corps.

La législation dans les différents pays, les mesures de prévention. La loi et son application. Les changements dans le temps. L’héritage romain (codes Théodosien, Justinien), conciles et synodes des Pères de l’Eglise, pénitentiels, décrétales… Les traités des juristes, l’Encyclopédie, Beccaria, Pestalozzi…

Prévenir et contrôler l’infanticide : la présomption d’innocence (déclarations de grossesses)…

La question de la preuve : le corpus delicti, l’enquête, l’expertise médico-légale et par conséquent le rôle de la médecine légale, les sentences.

Punir et condamner : norme et pratique (peine de mort, clémence du juge, enfermement).

Organisateurs

Pascal Hepner (Université d’Artois - France), Elena Taddia (Université de la Vallée d’Aoste - Italie) et Martine Valdher (Université d’Artois – France)

Comité scientifique

Anne Gagey (Université d’Artois - CREHS, Arras France)

Gregory Hanlon (Universié Dalhousie, Halifax Canada)

Pascal Hepner (Université d’Artois - CREHS, Arras France)

Tanguy Le Marc’hadour (Université d’Artois - Centre Ethique et procédure, Douai France, Centre d’Histoire judiciaire UMR 8025 CNRS-Lille 2)

Elena Taddia (Université de la Vallée d’Aoste Italie)

Appel à communications : Journée d’études « Matières pastorales »
Posted: Monday, September 30, 2019 - 19:26

Vendredi 6 mars 2020

EA 4398 PRISMES / PEARL/ Epistémè

Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3

 

L’essor de l’histoire du livre et de la lecture d’une part, et le material turnde la critique anglo-américaine d’autre part, ont invité les chercheurs à mieux prendre en compte l’importance de la dimension matérielle des écrits à la période moderne, qu’ils soient imprimés ou manuscrits, ainsi que le rôle de leur inscription dans l’espace public ou privé. Dans la lignée de ses travaux sur l’imbrication entre littérature et culture matérielle, l’équipe PEARL/Epistémè souhaite engager une réflexion sur les rapports entre la matérialité des textes et leur définition générique dans l’Europe de la première modernité.

On s’intéressera ainsi dans un premier temps au roman pastoral, genre qui connaît un grand succès partout en Europe aux seizième et dix-septième siècles. Il s’inscrit plus largement dans le « mode » pastoral, ainsi nommé en raison de la souplesse formelle et stylistique qui lui permet de faire se côtoyer et bien souvent se mêler poésie, théâtre, prose, inspirations musicale et picturale. Plus encore que les autres genres pastoraux, le roman se caractérise par une hybridité générique qui se traduit par l’insertion de nombreux poèmes grâce auxquels l’auteur(e) teste et exhibe ses talents poétiques, mais aussi de lettres, de messages codés ou cryptiques, etc. L’inscription matérielle du texte par la mise en abyme de ces écrits insérés se trouve redoublée ou prolongée par leur histoire éditoriale, en particulier par l’ajout de « clefs » identifiant les personnages fictifs à leurs « référents » supposés à la cour, qui bien souvent ne sont pas de la main de l’auteur(e). Lorsque les éditions et rééditions se succèdent, les romans peuvent même intégrer les traces de leur propre réception, grâce à l’ajout d’annexes ou de fins venant se substituer à celles absentes, lorsque – ce qui est souvent le cas (L. Plazenet) – l’auteur(e) n’a pu ou voulu terminer l’œuvre de manière explicite. Comme pour l’Arcadiede Philip Sidney en Angleterre, certaines éditions grandissent ainsi jusqu’à inclure plusieurs fins alternatives, tandis que d’autres auteur(e)s choisissent de publier indépendamment la leur (A. Weamys, 1651), à moins qu’il ne s’agisse de l’adaptation/réécriture d’un épisode précis du roman sur la scène (par exemple The Isle of Gullsde John Day, 1606). À travers ces multiples métamorphoses, le roman pastoral transcende régulièrement les bornes de son propre texte.

Les frontispices et illustrations, mais aussi les références à des œuvres picturales, qui peuvent se transformer en véritables ekphraseis, jouent un rôle majeur pour plonger le lecteur/la lectrice dans l’atmosphère d’otiumpropre à la pastorale, ou au contraire suggérer sa fragilité. L’imbrication entre littérature et peinture est telle que si les auteur(e)s peuvent faire allusion à des œuvres existantes voire célèbres, des artistes dépeignent à leur tour les passages les plus mémorables de ces œuvres. La musique y occupe également une place prépondérante : il n’est pas rare que des poèmes évoqués comme étant chantés dans le contexte fictionnel – à la suite de l’Arcadiede Sannazar, dont la structure met en miroir églogues et descriptions en prose – soient par la suite mis en musique. Ils entretiennent ainsi la fascination exercée par l’« imaginaire pastoral », et son emprise sur un réel bien moins idyllique. 

À travers ces « ponts » jetés entre fait et fiction, le roman pastoral accroît son influence culturelle, notamment dans les « salons », dont l’émergence est concomitante voire légèrement postérieure au succès de ce genre. L’esthétique du mélange qui le caractérise n’est en effet pas sans rappeler celle de la culture des salons où se succèdent moments de conversation, de lecture, jeux d’esprit, découverte d’objets nouveaux et d’artéfacts en tous genres. De tels objets écument aussi la pastorale, qu’il s’agisse des accessoires emblématiques des bergers, comme la houlette, la panetière ou la couronne de fleurs, ou bien de livres mystérieux, de miniatures, de reliques d’un ancien amour. Suscitant l’engouement et la curiosité, ces objets traversent librement les frontières du réel et de la fiction pour trouver leur réplique dans la « vraie vie », notamment dans la mode, l’architecture ou l’art des jardins. Texte et monde réel semble alors tenir en partage une même culture matérielle qui brouille d’autant mieux leurs frontières réciproques. Partant de la « chose littéraire » et des formes qu’elle revêt,  cette étude des « matières pastorales » vise donc à s’étendre bien au-delà afin d’explorer la mutuelle imbrication de l’écriture et de la culture matérielle.

Quelques pistes de réflexion, non exhaustives :

Le choix d’une circulation manuscrite et/ ou d’une publication imprimée ; 

l’histoire éditoriale du/ des romans ;

l’hybridité générique des romans ;

les adaptations picturales, musicales ou théâtrales ;

le rôle des circulations européennes ;

la « fan fiction » pastorale, c’est-à-dire les réponses, suites ou fins alternatives, ou bien les marginalia, rédigées par des lecteurs / lectrices anonymes ou non ;

la perméabilité entre « réalité » et fiction, notamment par le biais des « clefs » ;

la revendication ou la critique du roman pastoral comme genre « féminin » ;

la mise en scène de l’écriture et le rôle de la réécriture dans les romans.

Les approches comparatistes mettent en lumière la dimension européenne de la pastorale sont encouragées.

Les interventions, de préférence en français, n’excéderont pas vingt minutes. Les propositions de communication, de 300 mots environ, peuvent être envoyées à l’adresse suivante pour le 30 octobre 2019: aurelie.griffin@sorbonne-nouvelle.fr

Une réponse sera communiquée pour le 15 novembre.

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Bibliographie  sélective:

Brayman Hackel H., Reading Material in Early Modern England : Print, Gender, and Literacy, Cambridge, CUP, 2005.

Brayman H., J. Lander et Zachary M. Lesser (dir.), The Book in History, The Book as History : Essays in Honor of David Scott Kastan, Ithaca, Yale UP, 2016.

Chartier R., Culture écrite et société. L’ordre des livres (14e-18esiècles), Paris, Albin Michel, 1996.

Chartier R., « Lectures et lecteurs ‘populaires’ de la Renaissance à l’âge classique », in G. Guglielmo et R. Chartier, Histoire de la lecture dans le monde occidental, Paris, Seuil, 2001 [1997], p. 337-354.

Dandrey P. et D. Denis (dir.), De la polygraphie au dix-septième siècle, Paris, Honoré Champion, 2003.

Denis D. (dir.), Lire L’Astrée, Paris, PUPS, 2008.

Duval S., La Prose poétique du roman baroque, 1571-1670, Paris, Classiques Garnier, 2017.

GiavariniL., « Représentation pastorale et guérison mélancolique au tournant de la 

Renaissance : questions de poétique », Études Épistémè, n° 3, 2003, p. 1-27.

Giavarini L., La Distance pastorale : usages politiques de la représentation des bergers (XVIe-XVIIe siècles), Paris, Éd. de l’EHESS, 2010.

Irigoyen-Garcia J., The Spanish Arcadia : Sheep Herding, Pastoral Discourse, and Ethnicity in Early Modern Spain, Toronto, U of Toronto P, 2013.

Lallemand, M.-G., « Les poèmes d’Honoré d’Urfé insérés dans l’Astrée », Dix-septième siècle/2, n°235, p. 295-313.

Lallemand, M.-G., La Lettre dans le récit : étude de l’œuvre de Mlle de Scudéry, Tübingen, Gunter Narr Verlag, 2000.

Lallemand, M.-G., Les Longs Romans du dix-septième siècle, Paris, Classiques Garnier, 2013.

Lavocat F., Arcadies malheureuses. Aux origines du roman moderne, Paris, Honoré Champion, 2000.

Lavocat F., Fait et fiction. Pour une frontière, Paris, Seuil, 2016.

McKitterick D., Print, Manuscript and the Search for Order, 1450-1830, Cambridge, CUP, 2005.

Melnikoff K., Elizabethan Book Publishing and the Makings of Literary Culture, Toronto, U of Toronto P, 2018.

Mentz S., Romance for Sale in Early Modern England : The Rise of Prose Fiction, Farnham, Ashgate, 2006.

Mounier P., « La situation théorique du roman en France et en Italie à la Renaissance », Seizième Siècle, 2008, n°4, p. 173-193.

Pavel T., « La mesure de la pastorale », Études Françaises, vol. 45, n°2, 2009, p. 13-24.

Plazenet L., « Inopportunité de la mélancolie pastorale : inachèvement, édition et 

réception des œuvres contre logique romanesque », Études Épistémè, n° 3, 2003,

Pastorale et mélancolie (XVIe-XVIIesiècles), p. 28-96.

Prado P., « Sic transit… Un “roman” iconographique : Les Bergers d’Arcadiede Nicolas Poussin », L’Homme, n° 131, 1994, EHESS, p. 121-127.

Sherman W., Used Books : Marking Readers in Renaissance England, Philadelphie, U of Pennsylvania P, 2008.

Smith H. et Louise Wilson (dir.), Renaissance Paratexts, Cambridge, CUP, 2011.

Smyth A., Material Texts in Early Modern England, Cambridge, CUP, 2017.

Van Elslande J.-P., L’Imaginaire pastoral du dix-septième siècle, Paris, PUF, 1999.

Wall W., The Imprint of Gender : Authorship and Publication in the English Renaissance, Ithaca, Cornell UP, 1994.

Williams A., The Social Life of Books : Reading Together in the Eighteenth-Century Home,New Haven, Conn., Yale UP, 2017.

Salzman P., English Prose Fiction 1558-1700, Oxford, OUP, 1986[1985].

Scott Baumann E. et B. Burton, The Work of Form : Poetics and Materiality in Early Modern Culture, Oxford, OUP, 2014.

New Publications

La Douleur de l’autre. 16e-17e siècles — A. Bayle et R. Andrault (dir.)
Posted: 16 Sep 2022 - 11:21

Special issue of Histoire, médecine et santé.

L’empathie, notion centrale dans les humanités médicales aujourd’hui, n’a pas d’équivalent exact aux XVIeet XVIIe siècles. Des notions voisines, comme celles de pitié et de compassion, sont convoquées pour désigner les sentiments suscités par la douleur de l’autre. Dans une perspective interdisciplinaire, les articles de ce dossier s’intéressent aux réactions à la douleur physique dans des corpus variés : médecine pratique, élaborations théoriques ou écritures du for privé. Leur point commun est d’adopter une méthode d’investigation fondée sur l’analyse du lexique et des choix énonciatifs. L’« autre » est dans ce dossier un malade soigné par un médecin, un étranger observé par un voyageur, le représentant d’une altérité sociale ou d’une altérité naturelle comme les enfants ou les animaux. L’enquête met en évidence la manière dont les sujets s’émancipent des normes comportementales supposées être caractéristiques de la période. Elle contribue, au-delà, à déplacer les repères chronologiques dans l’histoire des sensibilités qui, pour la douleur, débute ordinairement au XVIIe siècle.

Empathy, a central notion in the medical humanities today, has no exact equivalent in the 16th and 17th centuries. Related notions, such as pity and compassion, are used to designate the feelings aroused by the pain of others. From an interdisciplinary perspective, the articles in this dossier focus on reactions to physical pain in various bodies of work: practical medicine, theoretical elaborations or writings from the private sphere. What they have in common is that they adopt a method of investigation based on the analysis of lexicon and enunciative choices. The 'other' in this dossier is a patient treated by a doctor, a foreigner observed by a traveller, the representative of a social otherness or a natural otherness such as children or animals. The survey highlights the way in which the subjects emancipate themselves from the behavioural norms supposedly characteristic of the period. It also contributes to shifting the chronological reference points in the history of sensibilities which, for pain, usually begins in the 18th century.

Webdoc - Le médecin face à la douleur, 16e-18e siècles  
Posted: 16 Sep 2022 - 11:19

Le médecin face à la douleur, 16e-18e siècles  
Ce webdoc sur les conceptions anciennes de la douleur est le fruit d'une recherche pluridisciplinaire, croisant histoire de la médecine, philosophie et littérature. 12 chapitres thématiques, des œuvres à lire et à écouter, ainsi que des entretiens avec des neurologues, confrontent le passé et le présent et permettent d'interroger notre compréhension actuelle de la douleur.

Pain and the Physician, 16th-18th centuries

This web documentary on early conceptions of pain is the result of multidisciplinary research combining the history of medicine, philosophy and literature. Through 12 thematic chapters, excerpts from works to read and to listen to, and interviews with neurologists, it brings the past face to face with the present and allows us to question our current understanding of pain.

La Princesse de Clèves by Lafayette: A New Translation and Bilingual Pedagogical Edition for the Digital Age (Bilis, Blanchard, Harrison, Visentin)
Posted: 15 Sep 2022 - 15:46

La Princesse de Clèves by Lafayette: A New Translation and Bilingual Pedagogical Edition for the Digital Age (available here)

Hélène E. Bilis, Jean-Vincent Blanchard, David Harrison, and Hélène Visentin. La Princesse De Clèves by Lafayette: A New Translation and Bilingual Pedagogical Edition for the Digital Age. Ann Arbor, MI: Lever Press, 2022. https://doi.org/10.3998/mpub.12629286. EPUB.

The editors of this volume designed it with French language and culture learners in mind. The text provides a bilingual edition to foreground French literary and linguistic content and encourage students’ reflection on the novel’s translation. The translation offers a rich variety of pedagogical dossiers with a wide range of resources and approaches for teaching and exploring La Princesse de Clèves in twenty-first century courses. The translation is enriched by translator’s notes that compare the current translation with earlier editions and shed light on the socio-cultural context of Lafayette’s time.

Prose et poésie dans les Essais de Montaigne (Nathalie Dauvois)
Posted: 14 Sep 2022 - 09:33

Nathalie Dauvois, Prose et poésie dans les Essais de Montaigne, Paris, Classiques Garnier, (1997) 2022.

Ressaisissant à sa source la démarche d’écriture de Montaigne dans la rencontre entre latin et français mais aussi entre prose et poésie, l’examen des zones d’échanges qui en découlent permet de définir la prose poétique des Essais en termes « d'action et de mouvement », selon les propres mots de Montaigne.

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Spectatrices ! De l'Antiquité à nos jours (dir. Véronique Lochert, Marie Bouhaïk-Gironès, Céline Candiard, Fabien Cavaillé, Jeanne-Marie Hostiou, Mélanie Traversier)
Posted: 14 Sep 2022 - 08:21

Spectatrices ! De l'Antiquité à nos jours, sous la direction de Véronique Lochert, Marie Bouhaïk-Gironès, Céline Candiard, Fabien Cavaillé, Jeanne-Marie Hostiou, Mélanie Traversier, Paris, CNRS Éditions, 2022.

Présentation :

Les femmes occupent une place continue dans le public du spectacle vivant depuis ses origines. Partis en quête des traces de cette présence, les auteurs ici réunis ont repéré les lieux et genres de spectacles que les femmes ont privilégiés, leurs emplacements dans les gradins et les salles, et tenté de retrouver leurs émotions, décantées des commentaires masculins.

Les spectatrices ont souvent été considérées comme soumises à leurs passions et dépourvues de toute distance critique. Elles ont été placées soit dans une position subalterne, reflétant leur place dans la société, soit aux premières loges, non pour leur offrir une qualité du regard mais pour permettre aux spectateurs de les voir et de scruter leurs robes et coiffes. Adversaires et défenseurs du théâtre ont débattu de la présence de ces femmes, les premiers la regrettant, tant cet art favoriserait des désirs illicites, les seconds la louant, les spectatrices devenant cette fois les garantes de la décence et de l’utilité du genre théâtral. Dans le même temps, la réception féminine a joué un rôle croissant dans les stratégies des auteurs et acteurs. En fonction de la période, du lieu, de leur appartenance sociale, les spectatrices ont pu jouir d’une plus ou moins grande liberté ; elles ont également usé de la scène comme d’un lieu d’émancipation, et ont parfois pris soin de laisser de leur expérience des témoignages directs.

Cette étude de grande ampleur permet de redonner à ces femmes une parole et une voix, un corps et des gestes, mais aussi des affects contrastés, de l’exaspération au plaisir.

Disponible en librairie et sur le site de l'éditeur.